Règlements de systèmes d'alerte et vie privée

Un système d’alerte désigne l’ensemble des procédures en interne par lesquelles il est possible de signaler l’existence d’un abus déterminé au sein de l'entreprise ou de l'administration publique (qui peut signaler quoi, auprès de qui doit-on signaler, comment faut-il signaler, …). Cette procédure donne alors lieu à une enquête.


Il est évident que ce processus de réception, de gestion, d'analyse, d'examen et de traitement de tels signalements peut donner et donnera lieu à un traitement de données à caractère personnel au sens du RGPD. Les règlements de systèmes d'alerte interne professionnelle doivent par conséquent être en accord avec le RGPD.

Ainsi, un signalement par un travailleur d'un comportement non approprié de la part d'un collègue donnera lieu au traitement par l'employeur de données à caractère personnel tant du dénonciateur que de la personne mise en cause.

Actuellement, il n’existe pas encore de législation européenne protégeant officiellement les lanceurs d’alerte. Le Parlement européen a voté une directive sur la protection des personnes dénonçant les infractions au droit de l’Union, mais elle n’est pas encore entrée en vigueur. Elle devrait être transposée pour le 17 décembre 2021. En Belgique, une protection existe mais uniquement pour les travailleurs du secteur public fédéral, grâce à loi « relative à la dénonciation d’une atteinte suspectée à l’intégrité ». Sa portée est donc limitée.

En l’absence de dispositions légale spécifique, la liberté d’expression du travailleur est ainsi mise en balance avec le devoir de loyauté envers l’employeur.

En raison de ce vide juridique, il est d’autant plus important que les règles relatives à l’établissement de procédures d’alerte soient débattues, sans quoi elles risquent de ne pas être supportées au sein de l'organisation.

La mise en œuvre d'un tel système implique un exercice d'équilibre où les intérêts légitimes de toutes les parties (l'organisation, le dénonciateur et la personne mise en cause) doivent pouvoir être conciliés.

Tout d'abord, il est indispensable que l’employeur prenne un éventail de mesures préventives afin de prévenir tout comportement non adéquat des travailleurs.

Il incombe donc à l’employeur de se demander si les formes déjà existantes de contrôle ne permettent pas déjà d'obtenir une compréhension suffisante du phénomène des comportements non conformes chez les travailleurs comme l’utilisation de caméras, les contrôles par sondages, les audits, …

L'on peut ensuite se demander si faire appel à des travailleurs afin de contrôler la conscience professionnelle d'autres travailleurs est bien nécessaire et si oui, si c'est proportionnel.

Dans ce cas, le travailleur est officiellement invité à prendre part à la logique de l’employeur du contrôle des travailleurs : il peut être sollicité afin de repérer des signes de comportement non intègre chez ses propres collègues et d'en faire rapport : trous dans la caisse, disparition de fournitures de bureau, exagération du nombre d'heures prestées, notes de frais déguisées, …

En d'autres termes, chaque travailleur devient potentiellement contrôleur et/ou est potentiellement contrôlé par les autres collègues. Cette manière de travailler peut difficilement contribuer à une ambiance de confiance réciproque, que ce soit entre travailleurs ou entre travailleurs et employeur. Il faut en outre tenir compte des conséquences contre-productives que peuvent avoir les actions proposées sur la qualité des relations de travail et du travail proprement dit.